ActualitésLe Sursis à l’Exécution des Jugements d’Orientation : une Dérogation de Droit Commun

2 janvier 2019

En matière d’appel d’une décision du juge de l’exécution, le sursis à exécution ne peut être fondé que sur l’article R121-22 du Code des procédures civiles d’exécution. L’article 524 du Code de procédure civile, relatif aux conséquences manifestement excessives, est ici inapplicable. Focus sur le fondement unique du sursis applicable aux ventes immobilières judiciaires.

L’APPLICATION DE L’ARTICLE R121-22 DU CPCE À L’EXCLUSION DE L’ARTICLE 524 DU CPC

L’Article R121-22 du CPCE, anciennement l’article 31 du décret du 31 juillet 1992 dispose :

En cas d’appel, un sursis à l’exécution des décisions prises par le juge de l’exécution peut être demandé au premier président de la cour d’appel. La demande est formée par assignation en référé délivrée à la partie adverse et dénoncée, s’il y a lieu, au tiers entre les mains de qui la saisie a été pratiquée.

Jusqu’au jour du prononcé de l’ordonnance par le premier président, la demande de sursis à exécution suspend les poursuites si la décision attaquée n’a pas remis en cause leur continuation ; elle proroge les effets attachés à la saisie et aux mesures conservatoires si la décision attaquée a ordonné la mainlevée de la mesure.

Le sursis à exécution n’est accordé que s’il existe des moyens sérieux d’annulation ou de réformation de la décision déférée à la cour.

L’auteur d’une demande de sursis à exécution manifestement abusive peut être condamné par le premier président à une amende civile d’un montant maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui pourraient être réclamés.

La décision du premier président n’est pas susceptible de pourvoi.

En effet, l’article 524 du Code de procédure civile permet de solliciter l’arrêt de l’exécution provisoire de la décision déférée à la Cour, notamment :

« lorsqu’elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives ».

Cet article n’a pas vocation à s’appliquer.

L’avocat doit se fonder exclusivement sur l’article R121-22 CPCE

Par conséquent, l’avocat se doit de vérifier les moyens sérieux d’annulation ou de réformation.
À ce titre, il ne pourra pas s’appuyer sur l’article 524 du CPC, mais sur l’article R121-22 du CPCE, qui dispose que :

« Le sursis à exécution n’est accordé que s’il existe des moyens sérieux d’annulation ou de réformation de la décision déférée à la cour. »

Les moyens d’appel doivent donc être sérieux et susceptibles d’entraîner la réformation ou l’annulation du jugement contesté.
C’est le critère indispensable de recevabilité du sursis à exécution.

Effets de la demande et cadre d’analyse

L’article R 121-22 du Code des procédures civiles d’exécution énonce qu’en cas d’appel, un sursis à l’exécution des décisions prises par le juge de l’exécution peut être demandé au premier président de la Cour d’appel.

Le même texte prévoit que, jusqu’au jour du prononcé de l’ordonnance, la demande de sursis à exécution :

  • suspend les poursuites, si la décision attaquée n’a pas remis en cause leur continuation

  • proroge les effets attachés à la saisie et aux mesures conservatoires

Illustration jurisprudentielle : Poitiers et Paris

La Jurisprudence du 1er Président de la Cour d’appel de Poitiers, dans une ordonnance du 2 octobre 2014, rappelle ce principe des moyens sérieux :

« Au principal, elle expose que la production de ces nouvelles pièces sont de nature à constituer un moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision déférée à la cour au sens de l’article R 121-22 du code de procédure civile d’exécution et justifie l’arrêt de l’exécution provisoire de droit. »

Au contraire, le Premier Président de la Cour d’appel de Paris, par ordonnance du 7 février 2017, a estimé que le demandeur :

« ne justifie pas d’un moyen sérieux d’infirmation », et l’a débouté de toutes ses demandes.

Conséquence : le fondement unique du sursis

Par conséquent, le Premier Président saisi d’une demande de sursis à exécution d’une décision du juge de l’exécution :

  • ne peut se fonder que sur l’article R121-22 du CPCE

  • à l’exclusion de l’article 524 du Code de procédure civile

En effet, la question à laquelle il appartient de répondre au juge est de savoir s’il existe des moyens sérieux d’annulation ou de réformation de la décision rendue à la cour.

Les moyens développés sur le fondement de l’article 524 du CPC sont inopérants.

En l’absence de moyens sérieux, la demande se doit d’être rejetée, car celle-ci n’entre pas dans les prévisions de l’article R121-22 du CPCE.

Un régime dérogatoire au droit commun

Le principe des motifs sérieux, tiré de l’article R121-22 du CPCE, est donc dérogatoire au droit commun.

Le sursis à exécution en matière de décisions du juge de l’exécution ne peut être accordé que sur le fondement de l’article R121-22 du CPCE, et non sur celui de l’article 524 du CPC. Seuls des moyens sérieux d’annulation ou de réformation peuvent fonder une telle demande, sous peine de rejet pur et simple.