Si votre bien immobilier fait l’objet d’une procédure de saisie immobilière et que vous pensez être surendetté, vous pouvez espérer, dans certaines conditions, voir la saisie immobilière suspendue ou reportée.
Tout d’abord, sachez que vous devez être informé de cette possibilité, dès le commandement de payer valant saisie immobilière. En effet, c’est le 13° de l’article R321-3 du Code des procédures civiles d’exécution qui prévoit, que le commandement de payer valant saisie comporte l’indication, si le débiteur est une personne physique, que s’il s’estime en situation de surendettement, il a la faculté de saisir la commission de surendettement des particuliers instituée par l’article L712-1 du Code de la consommation.
Mais qu’entend-t-on par surendettement ?
La situation de surendettement est caractérisée par l’impossibilité manifeste de faire face à l’ensemble de ses dettes, professionnelles et non professionnelles, exigibles et à échoir.
Attention, le fait que la valeur estimée de votre résidence principale dont vous êtes propriétaire (à la date du dépôt du dossier de surendettement) soit égale ou supérieure au montant de l’ensemble de vos dettes ne fait pas obstacle à la caractérisation de la situation de surendettement.
Il est également précisé par l’article L711-1 du Code de la consommation que la situation de surendettement peut également provenir de l’impossibilité de pouvoir faire face à un engagement de caution ou à un engagement solidaire relatif à une dette d’un entrepreneur individuel ou d’une société.
Enfin, cet article prévoit que le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement n’est ouvert qu’aux seules personnes physiques de bonne foi ; la bonne foi étant une condition de recevabilité qui est présumée. Une jurisprudence abondante est venue préciser cette notion qui est laissée à l’appréciation des juges du fond. La Cour de cassation exige, cependant, que les faits constitutifs de la mauvaise foi soient en rapport direct avec la situation de surendettement du débiteur.
Encore faut-il pouvoir faire la démonstration de votre état de surendettement avant que votre bien ne soit vendu. Il convient de remplir une déclaration de surendettement par l’intermédiaire du formulaire cerfa n°13594.
En cas de rejet de votre dossier de surendettement (la commission a un délai de trois mois pour rendre sa décision), un recours est possible dans les quinze jours à partir de la notification d’irrecevabilité de la demande.
Ainsi, on peut distinguer deux cas, selon le moment de la procédure de saisie immobilière :
Soit la vente forcée n’a pas encore été ordonnée lors de l’audience d’orientation,
Soit la vente forcée a déjà été ordonnée lors de l’audience d’orientation.
Première hypothèse : Si vous arrivez à faire la démonstration de votre état de surendettement avant le jugement d’orientation, c’est-à-dire si la demande est jugée recevable par la commission de surendettement avant que la vente forcée ne soit décidée lors du jugement d’orientation, alors, cette décision « emporte suspension et interdiction des procédures d’exécution diligentées à l’encontre des biens du débiteur », et donc de la saisie immobilière. La vente forcée pourra être suspendue.
Attention ! Cette suspension est provisoire, elle ne peut excéder deux ans.
Seconde hypothèse : Si la vente forcée a été ordonnée à l’audience d’orientation mais que la commission n’a pas encore déclaré la demande recevable, alors il n’y a pas de suspension automatique, comme dans le cas précédent. En effet, à ce moment-là, seule la commission (et non le débiteur), peut demander le report de la date d’adjudication, en saisissant le juge de l’exécution.
Si le Juge considère que la demande de la commission de surendettement est fondée sur des causes graves et justifiées, la date de l’audience d’adjudication est reportée, tout comme l’expulsion du propriétaire. Ce principe a été confirmé par la Cour de cassation dans deux décisions du 7 janvier 2016 et de 2019.
Par conséquent, il convient de déposer une déclaration de surendettement dès que le débiteur reçoit le commandement de payer valant saisie immobilière car plus il attend, plus il risque de perdre l’opportunité de conserver son bien. Notons enfin que dans le cas d’un bien soumis au régime de l’indivision (régime de séparation de biens ou coïndivisaires dans l’hypothèse de concubins par exemple), le dépôt d’une demande de surendettement par l’un n’empêche pas la poursuite de la saisie à l’égard de l’autre. La vente forcée n’est pas arrêtée. Ce point a été expressément tranché par la Cour de cassation dans un arrêt du 3 septembre 2015.
La Cour de cassation ne s’est pas prononcée sur le cas d’un bien appartenant à des débiteurs mariés sous le régime de la communauté. En effet, dans cette hypothèse rare, où un seul époux marié en communauté est déclaré recevable au surendettement, il semblerait que la suspension de la vente forcée doive être prononcée.
C’est la solution retenue par la Cour d’appel de Riom, dans un arrêt rendu le 17 juillet 2017, au visa de l’article L722-2 du Code de la consommation.
Quid lorsque le bien objet de la saisie immobilière fait l’objet d’un démembrement de propriété et que seul l’un ou l’autre des titulaires du droit de propriété démembré est recevable au surendettement ?
Il convient de distinguer selon que la dette est afférente au bien saisi ou ne l’est pas.
Si la dette concerne le bien saisi (charges de copropriété), Il semble que le surendettement d’un seul d’entre eux ne suffit pas à arrêter la procédure. En effet, selon le principe de la solidarité entre nu-propriétaire et usufruitier en copropriété, le débiteur non surendetté devra payer pour celui qui est surendetté. Dans un arrêt de la 3ème chambre civile, la Cour de Cassation a confirmé la validité de la clause de solidarité entre un nu-propriétaire et un usufruitier contenue dans le règlement de copropriété. Le nu-propriétaire et l’usufruitier sont solidairement tenus du paiement des charges de copropriété envers le syndicat des copropriétaires.
En revanche, si la dette ne concerne pas le bien saisi (dette personnelle d’un des nu propriétaires) alors la saisie ne semble pas envisageable. En effet, la pleine propriété ne saurait faire l’objet d’un acte de disposition sans l’accord des deux, usufruitier et nu-propriétaire La commission de surendettement va réunir l’ensemble des dettes du débiteur saisi et proposer à ses différents créanciers, lorsque cela est possible, un plan permettant de les rembourser selon différentes modalités et sur plusieurs années.
A noter que le débiteur saisi est alors automatiquement inscrit au Fichier national des Incidents de remboursements des Crédits aux Particuliers (FICP) lors du dépôt de son dossier, qui interdit ainsi de souscrire un nouveau prêt ou d’obtenir un rachat de crédits, mais cela peut-être, dans certains cas, un moindre mal…