ActualitésProcédure d’Expulsion et Vente aux Enchères : Focus sur l’Article R322.64 du Code des Procédures Civiles d’Exécution

18 novembre 2021

Devenir adjudicataire d’un bien aux enchères n’est que la première étape. Pour les biens occupés, l’expulsion du débiteur ou occupant sans droit peut retarder l’entrée dans les lieux. L’article R322-64 du CPCE encadre cette procédure. Est-il possible de gagner du temps en l’engageant avant le paiement total du prix ?

Engager une procédure d’expulsion dans le cadre d’une vente aux enchères semble être un long chemin semé d’embûches, qui peut en décourager plus d’un…

Est-il cependant possible de prendre les devants afin d’accélérer cette procédure et de gagner plusieurs mois ?

Pour ce faire, regardons plus en détail l’article R322-64 du Code des procédures civiles d’exécution.

L’article R322-64 du Code des procédures civiles d’exécution indique que :
« Sauf si le cahier des conditions de vente prévoit le maintien dans les lieux du débiteur saisi, l’adjudicataire peut mettre à exécution le titre d’expulsion dont il dispose à l’encontre du saisi et de tout occupant de son chef n’ayant aucun droit qui lui soit opposable à compter du versement du prix ou de sa consignation et du paiement des frais taxés. »

Le jugement d’adjudication vaut titre d’expulsion

À lire rapidement ce texte de loi, il peut être perçu comme un frein supplémentaire à l’expulsion de l’occupant sans droit ni titre ou de l’ancien propriétaire.

Alors même que le nouvel acquéreur souhaite profiter de son bien, faut-il qu’il attende d’avoir entièrement payé le prix d’acquisition pour engager une procédure d’expulsion, ou peut-il l’engager dès le versement partiel du prix ?

Le calendrier d’une vente aux enchères

On rappelle que l’adjudicataire verse 10 % de la mise à prix (minimum 3 000 €) le jour de l’audience d’adjudication, et qu’il dispose de 2 à 4 mois pour solder le prix.

Les frais de poursuite taxés et émoluments sont, quant à eux, payés dans le mois suivant l’adjudication définitive.

Exemple pratique

Un bien occupé, acheté aux enchères en juin, ne pourra être libéré, si l’expulsion n’est engagée qu’après paiement intégral, qu’à partir de juin de l’année suivante.

La cause :

  • Procédure longue

  • Trêve hivernale du 1er novembre au 31 mars (parfois jusqu’au 31 mai)

Attendre le solde du prix pour initier la procédure, c’est retarder l’usage du bien de plusieurs mois, voire années. Un frein à l’investissement.

Une interprétation favorable au lancement anticipé de la procédure

Une autre lecture de l’article R322-64 CPCE permettrait à l’adjudicataire d’engager la procédure d’expulsion dès le premier acompte versé.

Il conviendrait de distinguer :

  • La mise en œuvre de la procédure d’expulsion
    (commandement de quitter les lieux, tentative d’expulsion, réquisition de la force publique)

  • L’exécution effective de l’expulsion avec le concours de la force publique
    → qui ne pourrait avoir lieu qu’après paiement intégral

Intérêt pratique de cette lecture

Dans un contexte de saturation judiciaire et de trêve hivernale étendue, une telle interprétation :

  • Sauvegarde les droits du débiteur saisi

  • Protège les intérêts légitimes de l’adjudicataire

  • Optimise les délais d’expulsion

L’article R322-64 CPCE pourrait être interprété pour autoriser l’engagement anticipé d’une procédure d’expulsion, avant paiement complet. Cette approche, bien que non expressément validée par la jurisprudence, répond à un besoin pratique croissant d’accélérer la jouissance effective du bien. L’accompagnement par un avocat spécialisé est vivement conseillé pour sécuriser cette démarche.